B- Décès et hommages (109 ans)

Anne Françoise Aline ABALLÉA naquit le 20 février 1913 à Lambezellec (29). Cette commune n'existe plus depuis sa fusion avec Brest en 1945. En cette année précédant le début de la Grande Guerre, son père, Alfred ABALLÉA, a 26 ans. Il travaille comme ouvrier au pont. Il sera par la suite embauché à l'arsenal militaire. Compte tenu du contexte historique, nous pensons qu'il s'agit de ce pont qui fut remonté à partir de l'an 1909.

Natif de Lambezellec, il y meurt en 1968 à l'âge de 81 ans.

Sa mère, Marie Guillemette MIGADEL, meurt précocement en 1922 à l'âge de 34 ans. Ce funeste coup du sort intervient deux semaines avant le 9e anniversaire d'Anne.

Le 7 octobre 1933, Anne épouse un gars du coin en la personne de Pierre Marie LE VOURCH. Ils fonderont ensemble une famille. Le chemin du couple s'arrête en 1976 au décès de Pierre Marie à Houilles dans les Yvelines. S'ensuivront quarante-six longues années de veuvage pour Mme Anne LE VOURCH.

Toutes nos condoléances à sa famille. 

Le 26 janvier dernier, ma grand-mère Emma, doyenne connue de l'Allier, s'est éteinte paisiblement dans son sommeil rejoignant son mari Roger, décédé il y a plus de trente ans. J'ai le souvenir de mon grand-père taquinant ma grand-mère en lui disant "toi, tu deviendras vieille". La vie lui a donné raison, mais je ne pense pas qu'il envisageait l'âge de 109 ans et 281 jours pour son épouse. Eh oui, Mémé Emma, il te fallait encore quelques jours pour atteindre les 110 printemps et le podium des supercentenaires. La marche de ce podium a été trop haute pour toi, qui malheureusement, il y a quelques mois, t'es cassée le col du fémur. Alors encore très autonome, tu t'es retrouvé du jour au lendemain alitée. Malgré cette épreuve, tu as gardé le sourire et tu essayais de contenir au maximum les douleurs de ta fracture. Je profite de ce message pour remercier ses infirmières et infirmiers (Christine B, Anne, Christine M, Joseph et Maxime), son aide à domicile Marilène mais également toutes ses collègues qui sont venues renforcer l'équipe dans les derniers mois, sa doctoresse, sa Kiné Eléonore et sa pharmacienne Isabelle pour leur dévouement et l'aide apportée à ma maman pour maintenir ma grand-mère à son domicile.

Comment résumer presque 110 ans d'une vie commencée le 20 avril 1913 à Monteignet sur l'Andelot ? Tu avais tout peine 18 mois quand ton papa est parti à la guerre. Il a réussi à survivre aux batailles sanglantes de cette guerre, mais il a été fait prisonnier. Envoyé dans un camp en Allemagne, il ne réussira à revenir à son domicile que dans les premiers jours de janvier 1919. De ce retour, tu avais le souvenir d'un inconnu avec une immense barbe qui rentrait chez toi en pleine nuit. Effrayée et en pleurs, tu t'étais cachée derrière ta maman.
De 1919 à 1926, avec sabots de bois en été ou galoches en hiver aux pieds, tu prenais le chemin de l'école avec ta petite musette contenant ton repas de midi. C'est à la lumière de la lampe à pétrole que tu faisais tes devoirs. Durant ces années, la famille s'est agrandie avec la naissance de ta petite soeur Marie Joséphine en 1920, suivi en 1926 de ton petit frère Jean. Ce petit frère, qui avait une place particulière dans ton coeur, car tu avais 13 ans à sa naissance et à cette époque, l'école s'arrêtait. A partir de là, tu as aidé tes parents à la ferme devenant une seconde maman pour ton petit frère, mais également en travaillant dans les champs notamment en compagnie de ton cheval "Pouleau" avec lequel tu as souvent partagé ta pomme de ton quatre-heures. Ton cher "Pouleau", acheté début 1920 par ton papa, venait des Etats-Unis. Il avait été envoyé en France pour faire la guerre et s'est sorti avec un éclat d'obus dans le cou et la fâcheuse tendance à s'emballer au moindre bruit.
11/09/1931 : poussée par ton papa, tu obtenais ton permis de conduire. C'est au volant d'une Peugeot 201 que tu emmenais la famille et ton jeune amoureux en balade dominicale à Vichy. Combien de fois j'ai pu écouter se plaindre mon grand-père te s'arracher la peau de la main en tournant la manivelle pour démarrer ta voiture ?
29/09/1934 : c'est le mariage avec Roger connu l'année de tes 15 ans au mariage d'une cousine, et départ pour Saint-Pont.
1937 et 1943 marquent la naissance de tes deux filles Yvette et Yolande, née prématurée en pleine guerre. A l'époque, pas d'hospitalisation, elle est restée au domicile de ses parents qui ont fait avec les moyens du bord dans une période d'importantes restrictions notamment sur les produits de consommation. Pour l'anecdote, ma grand-mère est décédée dans la chambre qu'elle occupait pour la naissance de ses filles.
Les jours s'écoulent au sein de ta petite famille, marqués par le travail de la ferme, des brouettes avec la lessiveuse pour aller rincer le linge dans l'étang en face de ta maison avec le battoir (quel bonheur l'arrivée de la machine à laver !), des balades en vélo pour aller voir sa famille. Et à l'époque, il y avait des hivers si bien qu'une fois la neige t'a surpris alors que tu étais en visite chez tes parents. Impossible de repartir en vélo avec ta petite fille de 3 ans pour rejoindre ton mari à Saint-Pont, tu es restée bloquée trois semaines chez tes parents, sans téléphone pour prévenir ton mari.
Les années passent, tes filles se marient et naissent tes petits-enfants Yves, Gérard, moi, Geneviève et Serge. 1975/1976 arrivent la retraite bien méritée.
09/1984 : toute la famille est réunie à Saint-Pont pour fêter vos noces d'Or ne se doutant pas que c'était la dernière fois.
En effet, début février 1985, vous êtes victimes d'une tentative de cambriolage à votre domicile qui aurait pu mal tourner. Mémé Emma, tu as gardé le souvenir de deux hommes traînant des barres de fer aperçus au travers de tes persiennes. De jour-là, vous êtes venus vivre à Loriges dans la ferme de ta fille Yvette. Désormais, 3 générations cohabitaient dans 100 m² pour toujours simple, malgré tout de merveilleux souvenirs, certains bercés par les chansons chantées par mon grand-père. Mais 1988 est arrivée avec la terrible épreuve du décès accidentel d'Yves, l'ainé de petits-enfants, à l'âge de 19 ans. 1992 suivra avec le décès de ton mari. Après 58 ans de vie commune, il te faut désormais de continuer seule le chemin de ta vie rythmée par le jardin, les fleurs, le tricot ou le crochet selon l'humeur du moment, la lecture du journal, les balades désormais plus à pied qu'à vélo.
Arrive 1999, et c'est désormais au tour de ta fille et ton gendre de prendre leur retraite. Fermiers dans leur exploitation agricole, ils décident de restaurer la maison de Saint-Pont pour passer leur retraite, ainsi te voilà de retour sur ta commune de femme mariée.
Imperturbable, gardant le sourire et une grande curiosité, tu traverses les années : l'euro arrive pas de problème, tu t'y mets sans difficulté continuant de gérer tes comptes et d'écrire tes chèques jusqu'à près de 108 ans, tu découvres les nouvelles technologies (ordinateur avec le souvenir du mail que tu as écrit à tes neveux, comment expliquer le terme de smartphone que tu vois régulièrement dans ton journal, tu observes comment fonctionne le smartphone, et te voilà entrain de faire glisser avec ton doigt les photos...) et sans oublier ta passion des voitures jusqu'à la fin. Je garderais en souvenir notre balade en septembre 2019 que tu avais voulu faire pour découvrir ma nouvelle voiture. A tout cela, il faut rajouter une impressionnante mémoire : tu pouvais nous donner le nom de ton institutrice, de ton inspecteur de permis de conduire, les dates de naissance de tes arrière-grands-parents ou de tes arrière-petits enfants, la liste des présidents de la République de Raymond Poincarré à Emmanuel Macron assortie de petites anecdotes, ....
2013 tu vois arriver avec incrédulité tes 100 ans avec les regrets que ton petit frère soit décédé quelques mois avant, ainsi que Pierre, habitant de la commune né en février 1913 avec qui tu devais fêter ce changement de dizaine.
101,102,103, ... et les millefeuilles s'enchaînent pour fêter ton anniversaire, mais voilà tes beaux yeux viennent de se fermer définitivement. Officiellement tu ne seras pas supercentenaire, mais dans mon coeur, tu l'es depuis plusieurs années. Au revoir Mémé Emma